"Dieu est mort, on a retrouvé son cadavre
dérivant en orbite autour de Cassiopée en 2019"
Philip K. Dick, Message de Frolix-8.





vendredi 22 février 2008

16.

Je ne sais plus où j'en suis, rien de ce que je planifie ne fonctionne, j’erre hache à la main, j'ai vu F.A.K.K.2, et moi Lum May Yee hache à la main me sens toute petite — ce que j'ai dû faire pour en arriver là, bah, ce n'est pas bien grave, dans mes rêves je m'écartèle, je suis plus salope que tout ce que les pauvres fantasmes des hommes peuvent envisager — je dis salope, c'est le seul mot que le pauvre vocabulaire patriarcal accorde à mon sens de l'amour ; je n'ai pas besoin d'imaginer que l'on m'y force, je n'ai pas honte de ce qui m'émeut ou de qui m'émeut — je n'ai pas besoin d'imaginer quoi que ce soit dont je ne suis pas fière — je suis je — je dis je — je m'émeus moi-même — je m'aime — j'ai même du moi de reste pour aimer l'autre — je suppose l'autre à aimer — j’erre hache à la main pour un baiser en biseau de bon acier de hache — j’erre dans un niveau imaginaire autogénéré de DOOM II, ouille, j'ai mal à la tête !

Qu'on me préfère ruisselante des trombes de Singapour, me mirant dans l'épée de Yu-che, sucée par mes dentelles liquides, léchée par tous les dragons, au centre de toutes les transparences de l'eau et de mes voiles saturés, de toutes les osmoses des orifices comme liquide un instant contenu, un instant vertical, un instant mouillable, à espérer Ba…

J'enfile mes cuissardes, mes maniques, mon plastron de cuir renforcé de boucles, mon masque, comme on me préfère, pour la guerre, je lèche mes armes, je les essaie sur moi, elle sont rouges, je suis rouge, je m'entortille dans ces flots de tissus qui flottent derrière les héros chinois, du ciel et du rouge je projette une tente, dans la tente, des meubles de bois, dans les meubles, des livres de papier, dans les livres je suis, dans les livres je découpe des images, rectangles blancs, noirs, rouges.

Du verre, de la glace, du plexiglas, du plastic pour l'amour, du verre pour l'amour, gourdin en tresse de fibres optiques, espion pour ventre de basse transparence, catalogue Apple™ 1998 roulé en cylindre pour l'amour, laser sonique comme remix de Ground-Zero20, plein d'autres choses, des cris, des images, des couleurs, du rose, de l’ orange, de la transparence, du chrome, du noir, de l'amour, pour l'amour, pas de danse, crispation de l'aréole, gras de l'index, reniflement : un lézard ailé glisse d'un Présence du Futur de seconde main…

Qu'on me préfère arborant des élastiques, des tiges semi-rigides, des étançons flexibles, des extensions-réductions, une armure de peluche rose — suintante de glu à bite, avec godets suspendus à recueillir les sèves, avec vaisselle incorporée qui s'entrechoque : moins qu'humaine, donc…

Il va se passer quelque chose !

Une grande bouffée de fréquences inusitées, vierges dans ma sécheresse, fécondes dans mes humidités, minérales de leurs molécules, résidu sonore qui crépite sur ma peau, mes écailles, le pelage de mes extensions, l'acier de mes armes, me revoilà en nouvelle lamie en chasse nouvelle, en chasse encore, en éclair vivant ou éclair de mot, éclair de papier, éclair de la chair de tes oreilles (et ses cartilages), éclair du cristal de ton œil, éclair qui crépite et tout ça (moi je chasse)(guerre-éclair).

Qu'on me préfère le cul en l'air, baignée d'encens lourds, à compter qu'on me fourre, un sourire de cocaïne pour ne pas vomir (de la peluche rose), livrée en kit avec retour, retard, retors, retire, rupture, rotor, radar et tout confort (de la peluche rose), roucoulant une scie de Faye Wong les yeux barrés de rouge entravée sur une table gynécologique (de la peluche rose)(moi je chasse)(guerre-éclair).

Je le sens, je le sais, c'est d'une scie, c'est une scie qu'il me faut, un crocodile de poche, dents de quarts de temps, syncopes tranchantes, actionnée par tout le corps en rythme, yeux blancs, iris et pupilles au secret sous les paupières supérieures, sourire de serpent subreptice, des fentes, des fentes, des apparences, des immortalités, du papier de verre, des crochets où subsistent des lambeaux, une danse souple, coulée, continue, sans rythme d'abord.

Qu'on me préfère (de la peluche rose)(moi je chasse)(guerre-éclair)(nue).

Limule élémentaire, j'offre vie, alternative, destin, exactitude, une planche de surf tous les cent mille, et c'est d'un mur mouvant de moi, de mes entrailles, de mes membranes, de mes saignements voraces, raclant du sol un mètre de terre, gravats, ruines, boue organique, que je défonce le continent, jusqu'à ce que le sel de l'océan m'oblige à regarder en arrière : tous ces hommes sucés !

J'intercepte des messages :

Elle est là, la Serpent, la Chenille, le Ver dansant de la narine du Lézard-Tonnerre — elle est vue, spirale entre les îles, et certains l'adorent — oui, Crom Cruach est son petit frère — il est moins bien foutu — regarde, Joe, il lui pousse mille bras — qu'est-ce qu'elle en tient ? Mais, ce sont des haches ! Est-ce que tu peux voir la marque ? — leurs lames chantent de chocs et d'éclats — si on avait ça pour finir d'abattre toutes les forêts, ça serait bien pratique — est-ce que tu m'aimes ? — tu as vu son T-shirt Tank Girl, ça me rappelle quelque chose — écoute, tous les chants de la terre s'exhale de ses fentes, entends-tu ces chants ? — oui, cela fait :

Shei2 shuo1 ai4 shang4 yi1 ge du4 hui2 jia1 de ren2
Wei2 yi1 jie2 ju2 jiu4 shi4 wu2 zhi3 jing4 de deng3
Shi4 bu4 shi4 bu4 guan3 ai4 shan4 she2 mo ren2
Ye3 yao4 tian1 chang2 di4 jiu3 qiu3 yi1 ge an1 wen3
— oh-woh — nan2 dao4 zhe4 mei2 you3 bie2 de ju4 ben3
Guai4 bu4 de ren2 dong4 bu4 jiu4 shuo1 dao4 yong3 heng221

Mais c'est une chanson de Faye Wong22 — c'est quand même bizarre qu'elle, elle chante ça — il pleut encore et plus que jamais, aurons-nous de nouvelles inondations ? — pourquoi chante-t-elle cela ? — moi, je préfère toujours Di-Dar — les dragons manquent de mesure, surtout quand ils sont femelles — cette remarque est inutilement sexiste — je vois sur le quai une très jeune fille, elle porte une mini jupe, un top de stretch vert fluo lui bandant la poitrine, des bottes de cuir noir lacées, elle est seule et noyée par le déluge, qui est-elle ?

J'intercepte d'autres messages :
Je la préfère tressée dans un pare-flèches, suspendue à mon cou — moi je la préfère plate et lumineuse, au cinéma — moi je la préfère dans les approximations de l'écriture — moi je la préfère dansant la nuit à Amsterdam — mais ce n'était pas elle — qui sait qui sont les gens, ce qui les fonde, ce qui les motive, ce qui les lie ? — je la préfère avant de l'avoir jamais vue — je la préfère avant de l'avoir jamais voulue — elle est venue il y a longtemps pour un duel — si tu es comme elle, tu ne sais plus où tu en es, rien de ce que tu as planifié n'est adéquat — regarde en bas !
Je m'arrête, je me pose, je regarde les nuages, je vois comme ils s'étagent, d'une même nature transparents et opaques, la pluie ne les assèche pas.

Assise, j'écoute une chanson de Faye, elle fait :
La la, la la la la la.
Comme tout le monde — rien à en dire.

Qu'on me préfère (de la peluche rose)(moi je chasse)(guerre-éclair)(nue)(rien à en dire).

J'espère toujours des cataclysmes, des éblouissements, des siroccos, des renversements — assise jambes croisées sur une caisse de canettes de jus de goyave, sur un quai de Singapour, le menton dans les mains, je me presse la pommette droite du gras du majeur, je vois toutes les pluies d'Insulinde et au travers les murs de ma chambre, les livres, les images découpées dans des livres — quand Ba est là, il reste trop longtemps, on regrette la pluie.


20. Comme par exemple What a Day To Die de Violent Onsen Geisha in Conflagration - Project : Consume / Consuming Ground-Zero Vol.2 CMDD-00047 Sank-Ohso ©1997.

21. Qui dit qu'aimer quelqu'un qui ne rentre pas à la maison n'apportera qu'une attente sans fin ?
Serait-ce que peu importe qui on aime, on doit toujours de mander de la sécurité ?
— oh-woh — N'y a-t-il vraiment pas d'autre scénario ?
Pas étonnant qu'on parle toujours de "pour la vie"…
Traduit de l'anglais à partir de http://www.geocities.com/Tokyo/Towers/6617/fayewongenglish

22. Men4 - Zhang Ya Dong/Lin Xi in Faye Wong Faye Wong EMI 72438 2129929 ED-7012 ©1997 A Production House Ltd.

Aucun commentaire: